On ne présente plus Marcel Rufo, ce pédopsychiatre au long cours qui a participé à de nombreuses émissions télévisuelles et radiophoniques. Dans cet essai au titre explicite, il évoque toute l’importance de l’attachement, de la fusion des premiers temps jusqu’au nécessaire encouragement des parents pour accompagner l’enfant à s’autonomiser, à se séparer pour grandir. Au rythme de confidences personnelles et d’exemples puisés dans sa carrière, le pédopsychiatre nous invite à revisiter tous les fondements et enjeux du lien et de la séparation.
Au début, il y a une fusion nécessaire entre la mère et son enfant, une connivence sensorielle (toucher, voix, son, odeur…) qui les attache l’un à l’autre. Cette fusion, ce lien d’écoute, de soin, ce portage physique, psychique est indispensable, vitale pour ce petit être qui y puise une sécurité, une force qui lui permettra de conquérir le monde. C’est pourquoi les séparations précoces, en particulier, avec la mère sont le plus souvent douloureuses voire dramatiques pour le jeune enfant. Rufo, à travers des exemples précis évoquent ses multiples conséquences : le petit enfant privé de sa mère peut devenir agressif, triste, colérique, angoissé car il vit cette séparation comme un abandon, un traumatisme.
Il faut évidemment différencier les séparations subies pour de multiples raisons (hospitalisation, mort, divorce, maltraitance…) qui sont dramatiques de celles dites « naturelles » lesquelles sont nécessaires au bon développement de l’enfant. Il doit progressivement apprendre à se détacher d’un jouet, d’un ami, d’une maison « toute séparation est une épreuve dont il sort grandi et plus humain, une épreuve à travers laquelle il apprend qu’i lui est impossible de gagner s’il n’accepte pas de perdre, le plaisir de la conquête venant apaiser la douleur de la perte ». Tout notre vie nous oscillons entre se lier et se détacher, partir et revenir…
Mais comme le dit si prudemment Rufo « le travail des parents consiste à repérer la moindre tentative de leurs minots, non à la devancer. » Il ne faut donc pas précipiter les séparations mais les encourager. L’amour que l’on porte à son enfant n’est pas synonyme de fusion et donc d’indifférenciation, bien au contraire. Il faut l’aider à se « détacher » pour qu’il puisse s’autonomiser, s’affirmer, s’individuer mais cela se fait par étapes. Cette séparation sera d’autant plus facile pour l’enfant qu’il aura connu un attachement sécure petit.
Comme toujours ce livre informatif mais sans jargon prétentieux se prête à une lecture plaisante et très instructive.